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Villiers règle ses comptes avec Retailleau

En Vendée, Brutus/Retailleau croyait avoir définitivement tué César/Villiers. Quatre ans plus tard, force est de constater que César bouge encore et se fait toujours entendre. Il ne s’est d’ailleurs pas privé de parler tout au long du mois de décembre, et pas seulement au sujet de son dernier livre sur Jeanne d’Arc…

Le moins que l’on puisse dire, c’est que Philippe de Villiers n’a pas aimé, mais alors pas aimé du tout, que son suc­cesseur fasse retirer la crè­che du conseil général de Vendée au début du mois de décembre. Il l’a fait savoir, aussi bien dans la presse que via son compte Twitter. Une occasion également de régler des comptes avec son ex-dauphin, qui l’a poussé dehors il y a quatre ans déjà.
A première vue pourtant, rien ne distingue la position de Villiers et celle de Retailleau lorsque le tribunal administratif de Nantes impose au conseil gé­néral de retirer la crèche qui trônait pour chaque Noël depuis plus de 25 ans dans le hall de l’hôtel du département. Le premier dénonce, chez Eric Brunet, sur RMC, le « laïcisme totalitaire » qui veut « éradiquer nos racines culturelles, notre identité, notre patrimoine ». Dans une tribune parue dans « Le Figaro », le second s’en prend au fondamentalisme de la libre pensée qui « nie deux dimensions essentielles de l’unité française : la laïcité, qui dessine la largeur de l’espace public ; et l’identité qui lui donne sa profondeur historique et culturelle ».
Mais si on suit un peu l’actualité locale, c’est par médias interposés que les deux figures de la politique vendéen­ne ont d’abord montré leurs différences, avant de s’écharper publiquement.

« Quel manque de courage »
Sur Twitter, le 9 décembre, Villiers annonce la couleur : « Je vais à Béziers pour dire à Robert Ménard : n’enlève pas ta crèche, résiste. » Le 11 décembre, toujours sur son compte Twitter, il s’exclame : « J‘apprends que la crèche du conseil général a été enlevée : quel manque de courage. » Deux jours plus tard, il récidive chez nos confrères de « Ouest France » et dénonce « la grande faiblesse » du conseil général et… de son président. « Il fallait tenir […] Vous imaginez des gendarmes venant enlever une crèche dans le hall du conseil général, comme au temps des Inventaires en 1905 ? » Et de ressortir les vieux dossiers, sur le thème « moi, au moins, j’ai résisté contre les laïcards ».
En 1996, en effet, la Fédération des Œuvres laïques, la FOL, avait cherché des noises au conseil général, à propos de son logo, le double cœur vendéen, surmonté d’une couronne et d’une croix. Villiers ne s’était pas laissé faire et le tribunal administratif de Nantes, en décembre 1997, puis la cour administrative d’appel, en mars 1999, lui avaient donné raison. Un vieux dossier, une affaire qui a presque 20 ans, mais qui permet aujourd’hui à Philippe de Villiers de faire valoir toute sa différence avec Bruno Retailleau et, tant qu’on y est, de l’égratigner au passage.
Forcément, au bout d’un moment, tout cela a fini par agacer sérieusement l’actuel président du conseil général et président du groupe UMP au Sénat. Celui-ci ne regrette « absolument pas » d’avoir enlevé la crèche : « Pour l’autorité de la loi, c’est important. Je ne suis pas au-dessus des lois » (c’est beau comme du Chirac). Il a même expliqué à « Ouest France », légaliste jusqu’au bout de l’oreille de l’âne mâtiné d’un habillage chrétien : « La crèche renvoie à des symboles de paix et de douceur. Pas de conflit. Il ne faut pas souffler sur les braises. » Autrement dit, tendons la joue gauche après avoir pris une claque sur la joue droite pour rester dans un registre évangélique.

On verra ce qu’on verra… à Noël 2 015
En revanche, question « paix et douceur » de Noël, on trouve mieux. Car Retailleau va envoyer en mission ses seconds couteaux. Ainsi, Yves Auvinet, conseiller général des Essarts, s’en prend-il à son ancien patron, toujours dans « Ouest-France » : « Résister à qui ? Résister à quoi ? Villiers réécrit un peu l’histoire à son profit ! Il ne s’est pas opposé à une décision du tribunal administratif, pour la bonne et simple raison que le juge avait débouté l’association et donné raison au département. » Son collègue du canton de Moutiers-les-Mauxfaits, Marcel Gauducheau, se dit quant à lui « estomaqué par l’attitude de Philippe de Villiers, qui, une fois de plus, se jette sur l’actualité pour régler ses vieux comptes avec le passé ».
Ces attaques n’ont pas calmé Philip­pe de Villiers, bien au contraire. Le 20 décembre, alors qu’à Béziers le tribunal administratif autorise l’installation de la crèche dans la mairie, il félicite Robert Ménard et ajoute : « Le conseil général de Vendée est ridicule. C’est une honte. » Et il insiste, histoire de bien marquer le coup : « Je demande à Bruno Retailleau de remettre la crèche pour Noël au conseil général de Vendée ». Une demande restée lettre morte, au moins pour cette année.
Car Retailleau, qui a renoncé à faire appel de la décision du tribunal administratif, annonce maintenant une gran­de exposition de crèches dans le hall du conseil général, mais pour Noël… 2 015. Résultat : il le fait et Philippe de Villiers aura eu raison de tempêter ; il ne le fait pas et Villiers aura eu raison de tempêter. Ou comment perdre à tous les coups alors qu’il était si simple de tenir bon…    
Jean Masson


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