La grogne monte en Moselle contre Florian Philippot. A la base du FN. Chez les « petites gens », ces militants qui estiment être méprisés par « les Parisiens », l’équipe parachutée du vice-président du FN. Et qui ne se reconnaissent plus dans le Front « new look ». Au point d’avoir alerté Marine Le Pen.
Quand Florian Philippot a été désigné pour défendre les couleurs du FN aux élections législatives de juin dernier, dans la 6e circonscription de la Moselle, les militants historiques locaux ont fait contre mauvaise fortune bon cœur. Après tout, celui qui était alors le porte-parole de Marine Le Pen, après avoir été le directeur stratégique de sa campagne présidentielle, semblait prometteur. Et en effet, bien que parachuté en territoire mosellan, Florian Philippot, s’il n’a pas réussi son pari – être élu député – a fait mieux que ce qu’on lui prédisait.
Malgré la candidature dissidente de l’ancien secrétaire départemental du FN mosellan, Eric Vilain – débarqué du FN juste avant la campagne et ayant tout de même obtenu 4,09 % des voix –, Philippot s’est qualifié pour le second tour avec 26,34 % des suffrages, aux dépens du député UMP sortant, Pierre Lang, en place depuis 2002 (et déjà élu de 1993 à 1997). En duel face à Laurent Kalinowski, le maire socialiste de Forbach, Philippot a été battu sur le score honorable de 53,70 à 46,30 % des voix. Aux municipales de 2014, il devrait être candidat dans l’une des communes de la circonscription où il a obtenu ses meilleurs scores.
« L’Algérienne » concentre bien des griefs
Tout irait donc pour le mieux pour celui qui, au fil des mois, s’est imposé comme le véritable numéro deux du Front national, si la base militante ne renâclait pas à le suivre. Pour preuve de leur détermination, une demi-douzaine de militants frontistes sont là, installés dans un café de Forbach, calmes mais déterminés, le verbe clair, tous engagés depuis longtemps… mais plus forcément pour très longtemps. Que Philippot ait fait HEC et l’ENA n’est pas du genre à intimider ces représentants de « la France qui se lève tôt », tous marqués par la culture ouvrière et minière et qui, s’ils ont été sensibles au discours antimondialisation de Philippot, en sont maintenant las.
Antoine (1), par exemple, n’en peut plus : « Il répète toujours la même chose. A la télé ou ici, il nous récite son catéchisme. On en a marre. En fait, il n’a rien à nous proposer. » Pierre précise : « La Moselle ne l’intéresse pas. Tout ce qu’il veut, c’est un mandat. Et maintenant, on a compris : s’il y a des places à prendre dans le secteur, ce sera pour sa bande de Parisiens. Nous, on ne compte pas. On a pourtant des jeunes qui sont bien… » La « bande » en question, ce sont ceux que Philippot a amenés dans ses bagages lors des législatives, tels Joffrey Bollée, son directeur de cabinet et ami proche, et Amel Amazir, dite « l’Algérienne ».
Cette dernière est une énigme comme elle l’était déjà quand elle œuvrait au siège de campagne de Marine Le Pen durant la présidentielle, boulevard Malesherbes – amenée, déjà, par Philippot. A les en croire, elle n’a pas été recrutée sur ses compétences. « Elle ne fait rien sans que ce soit une c… », dit l’un, assurant qu’il en a dressé une liste impressionnante. Amel Amazir est surnommée « l’Algérienne » depuis qu’un jour, lors d’une fête de la fédération de la Moselle, elle a dit devant toute une tablée : « Oui, je suis Algérienne. » Provocation ? Plus tard, Philippot a dit qu’elle ne l’était pas. Ou pas seulement. Mais le mal était fait, amplifié par un texte publié sur le site de Riposte laïque qui s’étonne que « l’assistante personnelle de Florian Philippot [soit] 100 % algérienne et ne possède même pas la nationalité française ! […] N’est-on pas là en totale contradiction avec la ligne classique défendue par le FN ? »
Une autre anecdote a fait penser aux militants de base qu’on les prenait vraiment pour des abrutis.
Lors de ce même repas, Philippot, étant interrogé par un militant intrigué sur ses liens avec « l’Algérienne », c’est Amel Amazir qui avait répondu à sa place. En disant qu’il était… son compagnon. Ce qui n’est apparemment pas le cas.
« On aurait dû donner le parti à Gollnisch… »
Courant décembre, un militant mosellan et pas des moindres, puisqu’il fut le suppléant de Florian Philippot aux législatives de juin, a écrit à Marine Le Pen. Alain Friderich, joint par téléphone, n’a pas souhaité nous communiquer cette lettre ni nous en livrer le contenu. Il attend une réponse. Ses camarades frontistes, eux, n’attendent plus grand-chose.
André, par exemple, est écœuré : « Quand les Parisiens ont débarqué, ils n’avaient même pas le permis de conduire ! Il a fallu véhiculer Philippot et sa bande ! Résultat : on lui a payé sa campagne ! Avec nos petits salaires ou nos retraites ! Parce que pour le remboursement de l’essence, on attend toujours. Nous, on est peut-être des petites gens, mais on a bossé toute notre vie. Et on a des valeurs. »
Antoine reprend la parole : « Et tu te souviens quand