Comme un hamster dans sa cage, on a parfois l’impression de tourner en rond dans cette société. Voilà qu’on nous refait le coup de la France raciste ! Tout ça à cause d’une pauvre photo d’un petit ouistiti mignon ! Ah, ça, on ne peut pas reprocher aux journalistes de manquer de persévérance. Quinze jours, ils auront touillé avant que la mayonnaise ne prenne. Les portiques écotaxe démontés, les radars explosés, la révolte qui gronde, les entreprises qui ferment les unes après les autres, le pays qui décroche à la vitesse de la lumière : sous le tapis. Place à l’essentiel : la peau de banane agitée par une gamine.
« La banane me tue », écrit Christine Angot. Qu’elle essaye l’ananas. Les victimes défilent sur les plateaux télé et nous tirent les larmes. Taubira outragée, Roselmack brisé, Debbouze martyrisé. Les pauvres chéris, ça doit être duraille pour eux. Roselmack se sent ramené à sa condition de « Nègre ». J’en connais pourtant qui seraient prêts à se barbouiller au bouchon de liège brûlé pour être à sa place. A l’entendre, on le croirait au fond d’une soute à destination d‘un champ de coton américain. Il veut tout, Harry : présenter le 20 heures sur la première chaine nationale et faire pleurer la ménagère sur sa condition de paria.
Quant au prolo blanc qui survit dans les cités de l’immigration, ce toubab, il n’a qu’à fermer sa gueule. Le racisme, c’est une affaire sérieuse, c’est réservé aux millionnaires de la télé et aux « minorités visibles ». Traitez un Chinois de jaune d’œuf, vous êtes raciste. Plaignez-vous d’être traité de blanc d’œuf, vous stigmatisez les immigrés, vous êtes encore raciste. Il faudrait ajouter un paragraphe à la Constitution, comme ça ce serait réglé. Article 1 : « L’homme blanc est une ordure depuis Clovis. »
Dans un colloque intitulé « Repères contre le racisme, pour la diversité et la solidarité internationale », Rokhaya Diallo expliquait il y a quelques mois que « le fait d’être Blanc implique d’être né dans un système conçu par l’Histoire au bénéfice des Blancs. La blanchité permet de tirer profit (souvent involontairement) du fait que les minorités sont discriminées. On peut le nier, l’ignorer ou être le plus fervent des antiracistes, rien n’y fait : être Blanc signifie hériter d’un système de domination qui procure des bénéfices ». Le prolo blanc ne le sait pas, mais c’est un héritier qui accumule les bénéfices en exploitant Harry Roselmack. La bonne nouvelle dans cette prose d’esclave, c’est que même en étant « antiraciste fervent », on n’échappe pas à sa condition de salaud. Je vous laisse achever le raisonnement.
La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) a rendu son rapport annuel le 25 octobre dernier. Elle dénonce de son côté une montée « des sentiments anti-immigrés et anti-musulmans » en Europe. Heureusement, elle apporte aussi des solutions : augmenter le nombre d’immigrés et de musulmans. Pour le reste, elle recommande aux Etats européens « de mener un dialogue régulier et constructif avec les représentants des communautés musulmanes et d’encourager le débat dans les médias sur la responsabilité qui est la leur d’éviter de perpétuer des préjugés ». Même sous l’ORTF, on n’aurait pas osé un tel cynisme. Et puis de toute façon, « les pays européens doivent assumer leur identité multiculturelle et reconnaître le rôle majeur que joue l’immigration dans l’économie ». Quelques jours plus tard, Claude Goasguen donnait, dans un autre rapport, le coût réel de l’Aide médicale d’Etat en 2013 : près d’un milliard d’euros. L’Etat est généreux, qui rembourse rubis sur l’ongle les caisses d’assurance maladie sans aucun contrôle dès lors que les bénéficiaires sont immigrés et clandestins. On devrait survoler l’Afrique et balancer des liasses de 500 euros, ça irait plus vite.
Allez savoir pourquoi, ce milliard d’euros claqué à soigner le tiers monde, ça a tendance à énerver de plus en plus le Français pressuré d’impôt qui peine à boucler son mois. Mais patience, camarade, tes ennuis sont presque terminés. « La reprise est là », a déclaré Ayrault à Saint-Etienne le 4 novembre.
Après Petroplus, PSA et ArcelorMittal, voici maintenant La Redoute, Alcatel-Lucent, Tilly-Sabco et FagorBrandt qui décollent. Il faut vraiment être débile pour ne pas la voir, la reprise. Bercy vient du reste de faire ses comptes : 1 000 plans sociaux en 2013, 12 790 entreprises ayant déposé le bilan au seul troisième trimestre. Quant aux experts d’Altares et de Natixis, ils prévoient encore 150 000 à 180 000 emplois supprimés dans les deux prochains mois. « La France est en train de remonter la pente », a ajouté Ayrault. Bientôt, on va être obligé de mettre des rires enregistrés quand il parle, ce navet. Depuis 2008, on nous vend la crise « derrière nous » ; la plaisanterie va-t-elle encore durer longtemps ?
La seule réalité, c’est que la crise économique est à présent doublée d’une crise sociale et que les crises économique et sociale seront demain triplées d’une crise politique et institutionnelle. Pas sûr alors que les bananes suffiront à détourner l’attention.
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