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Imaginons, cher lecteur, qu’en cette nouvelle année pleine de pro­messes, je prenne les 1 000 eu­ros qui sont sur ton compte en banque, sans t’en informer, et que je m’amuse à les placer sur les marchés. Si je gagne et me retrouve avec 1 100 euros, je te rends tes 1 000 eu­ros et je garde les 100. Si, au contraire, je perds et qu’il ne me res­te que 900 euros, je te rends ces 900 eu­ros avec un grand sourire et une petite tape dans le dos et je de­mande à l’Etat de régler la différence… avec tes impôts. Il n’est pas né­cessaire d’être grand clerc pour imaginer que ton désir le plus vif sera alors de me distribuer quelques gi­fles, voire, si tu es exagérément ré­publicain, de ficher ma tête d’escroc au bout d’une pique.
Or, c’est très exactement ainsi qu’agissent les banques. Elles spéculent sur les marchés avec les dé­pôts dont elles ont la garde, prennent des risques insensés, conservent les gains quand elles gagnent mais socialisent les pertes quand el­les boivent le bouillon, avec ce chan­tage imparable : « Si on coule, tout le monde plonge avec nous ». En 2008, el­les ont été sauvées avec de l’argent pu­blic, sans qu’aucune contrepartie n’ait été exigée de leurs actionnaires et de leurs créanciers. Ce sauvetage a en partie précipité le naufrage des Etats et a eu pour conséquences la ri­gueur, le chômage et la paupérisation d’un grand nombre de ci­toyens. Une des manières d’éviter que ce scandale se renouvelle (main­tenant que les caisses sont tout à fait vides, ce serait du reste très rock’n’ roll), est bien évidemment de séparer les activités de crédit et de dépôt des opérations spéculatives afin de li­miter les risques pris par les ban­ques, mais supportés par vous et moi.
C’est ce que proposait le candidat socialiste à la présidentielle. Il y a près d’un an, le 22 janvier 2012, François Hollande enflammait Le Bourget avec son discours exalté con­­tre la finance. Il prenait dans la fou­lée l’engagement de « séparer, au sein de chaque établissement bancaire, les activités de crédit et de dépôt des opé­rations spéculatives » (proposition 7), ce qui était peut-être la seule et unique proposition de bon sens dans le fatras progressiste cucul la praline ou carrément odieux du pro­gramme socialiste.
Un an après, voici le projet de loi tant attendu sur la réforme bancaire, présenté en conseil des minis­tres, le 19 décembre dernier, par Pierre Moscovici. Il fait penser à ces baudruches achetées en foire qui se dégonflent lentement pendant la nuit. On se couche avec un beau ballon gonflé à bloc ; on se réveille : c’est une chiffe molle. Il suffisait d’ailleurs de voir la mine réjouie des banquiers pour comprendre que


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  • Publié dans le numéro : 2596
  • Auteur : Julien Jauffret

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