Et deux scandales pour « Minute » en moins d’un an, deux ! Pas touche à Taubira, pas touche à Najat Vallaud-Belkacem ! Les icônes de la gauche morale, forcément morale, sont intouchables. Des Intouchables même, avec la majuscule qui les distingue du commun des Français.
C’est une information de première importance que la Vérité médiatique a délivrée à la France la semaine dernière. Contrairement à ce que nous avions cru pouvoir écrire en Une de « Minute », Najat Vallaud-Belkacem n’est ni marocaine ni musulmane. Dont acte. Nous prions donc nos lecteurs de bien vouloir nous excuser pour cette double erreur. Nous prendrons garde à l’avenir de ne pas oublier que la Vérité médiatique est supérieure à la réalité. L’origine et les racines d’un être ne sauraient expliquer en rien les carrières et les choix. Nous ne le ferons plus. Ne serait-ce que pour éviter aux cuistres de citer le camarade Desproges et son gentillet : « Il est plus économique de lire “Minute“ que Sartre. Pour le prix d’un journal, on a La Nausée et Les Mains sales. » Si elle l’avait connu, Marine Le Pen lui aurait demandé de ne pas nous faire de réclame. Aucune « Marocaine musulmane » ne s’est donc glissée dans le gouvernement de la France. Illusion d’optique. Mirage oriental. Calembredaine républicaine.
Réalité interdite, réalité travestie
Dans l’Inde traditionnelle, l’Intouchable est celui qui n’existe pas, qui n’appartient à aucune caste. En France, c’est le contraire, lové dans un paradoxe : l’Intouchable échappe à toute critique du simple fait de ses origines, qu’il convient de ne jamais rappeler, si ce n’est pour en louer l’essence précieuse, quasi surnaturelle, comme il convient de s’abstenir d’écrire que l‘idéologie du métissage n’est jamais que le miroir du national-socialisme, le métis, le non-Blanc, remplaçant « l’Aryen ».
Un voyou n’est jamais un Marocain mais un « jeune ». En revanche, un footballeur qui marque des buts n’est jamais un « jeune » mais un champion d’origine marocaine qui pratique avec une ferveur admirable le ramadan…
L’Intouchable républicain représente aujourd’hui le privilégié par excellence d’un système qui vise à l’imposer en haut pour mieux substituer par en bas. L’Intouchable peut encore s’imaginer victime du racisme, il appartient, en fait, à la classe des maîtres. Il est chat perché sur le toit républicain. Parler de ce qu’il fait en liant à d’où il vient est strictement défendu (« streng verboten »).
Ce dont, en revanche, il nous faut quand même bien parler, c’est de la gauche. Tellement vieille, tellement bête, tellement moche. Tellement morte, en fait. Un président moins populaire en France dans les sondages que l’Etat islamique du Levant (voir pages 8-9). Un ministre des Finances qui sort de la banque Rothschild. Des secrétaires d’Etat d’une semaine qui oublient de payer leurs impôts…
Et s’il n’y avait que cela. Une idéologie qui ne fait plus peur à grand monde, aussi étrangère au XXIe siècle qu’un totem des coupeurs de tête des iles Salomon. Quand « Libération » commente notre Une et celle de « Valeurs actuelles », son éditorialiste parle de Maurras, de « Je suis partout ». Quelle modernité ! Avec de tels exorcismes, le diable brun a des jours de lumière devant lui.
La mort de la gauche et « Minute »
Il n’y a plus que la droite parlementaire pour ne pas avoir pris connaissance de l’avis de décès de la gauche. Il n’y a plus que des Juppé ou des Fillon pour sacrifier la France au même dieu du métissage laïque et obligatoire. La gauche est, au fond, leur univers mental. Ce bidet d’idées croupies où la Ve République se lave depuis si longtemps leur convient, pourvu que le bouillon ne nuise pas aux affaires et à la carrière.
Pour autant, mort de la gauche ne veut pas dire résurrection de la droite. On parle de la vraie droite, de celle se prétendant « ni de gauche ni de droite », déclaration par laquelle se distinguent depuis plus d’un siècle les droites de la droite avec une constance dans la candeur qui en dit long sur la force intellectuelle de la gauche.
Si incontestablement 2014 est l’année des promesses pour le Front national avec un score historique de 25 % aux européennes, si pour la première fois un sondage donne Marine Le Pen gagnante à un second tour d’élection présidentielle, le chemin est encore long. Si long qu’il ne conviendrait pas de se perdre ou, au prétexte d’aller plus vite, de se débarrasser d’idées subitement encombrantes. L’UMP aussi a su se faire élire en parlant de « kärcher » et voulu se faire réélire à grands coups de « pains au chocolat ». Il ne faudrait pas qu’une fois au pouvoir, dans ses villes par exemple, le FN, au motif légitime de gagner d’autres batailles, oublie les armes qui lui ont permis de gagner les précédentes.
Dans ce contexte, « Minute » joue son rôle. « Torchon fasciste » pour la gauche, journal populiste pour la bien-pensance, nous savons que nous agaçons aussi la présidente du FN. Nos articles à propos des mariages homosexuels célébrés par des cadres du parti, ceux sur l‘appétit d’un Florian Philippot ou contre les déclarations anti-identitaires de tel responsable musulman, aujourd’hui démissionnaire grâce à nous, ne visent pourtant pas à autre chose qu’à rappeler qu’on ne prend pas le pouvoir en oubliant d’où l’on vient, qui l’on est… et ce que les Français attendent qu’on soit.
Yves Theurin