Dimanche, une illusion d’optique a fait croire que la ville de Paris n’avait pas échappé à la vague bleue, conformément aux vœux de Jean-François Copé. Certes, NKM devance Anne Hidalgo sur l’ensemble de la capitale. Mais les réserves de voix sont à gauche, pas à droite. Et le semblant de vague est bleu tout court, pas bleu marine. A croire qu’il n’y a décidément pas de place pour le Front national à Paris. Les listes dissidentes de droite et le FN ont trinqué.
Concernant les divers droite, ne peuvent se maintenir que Charles Beigbeder dans le VIIIè arrondissement, Dominique Tiberi dans le Vè et Hélène Delsol dans le IIè (11,01 %). Dans le XVIè arrondissement où Claude Goasguen a été réélu dès le premier tour (63,05 %), David Alphand (9,31 %), conseiller de Paris sortant, devra se contenter d’un poste de conseiller d’arrondissement. Charles Beigbeder est le seul à pouvoir être élu conseiller de Paris vu le mode d’élection complexe dans la capitale.
Quatre arrondissements sont acquis à la droite dès le premier tour : le VIè (avec le copéiste Jean-Pierre Lecoq), le XVIè (déjà évoqué), le XVIIè où le maire sortant Brigitte Kuster a réalisé le score assez inattendu de 53,53 % et le Iè où Jean-François Legaret (51,72 %), qui avait obtenu plus de 20 % des suffrages lors de la primaire UMP, contre Nathalie Kosciusko-Morizet, profite du retrait de la liste Beigbeder et est idéalement placé, après avoir réalisé une remarquable campagne, pour prendre du poids dans le groupe UMP d’opposition après l’échec de NKM dimanche prochain.
Le FN rate totalement son pari
Le Front national, lui, ne décolle pas. Ou si peu. Il passe de 3,17 % en 2008 à 5,9 % en moyenne six ans plus tard. Ses fiefs ? Il n’en a même pas… Il réalise ses scores les moins mauvais dans les quartiers Est ( XIIIè, XIXè et XXè arrondissements), avec une pointe, dans le XIXè arrondissement, à 7,94 % sous la conduite de Michel Bulté, l’ancien maire RPR de l’arrondissement, passé en une vie politique du maoïsme au Rassemblement Bleu Marine.
En conséquence logique de cette défaite que les sondages, encore une fois, n’avaient pas prévu, puisque le FN était régulièrement donné à 8, 9, voire au-dessus de 10 %, le Rassemblement Bleu Marine se déchire dans la capitale : Paul-Marie Coûteaux, président du Siel, passerelle entre le FN et les milieux souverainistes, et tête de liste RBM dans le VIè arrondissement (où il a obtenu 4,80 %) souhaite arriver à un soutien de certaines listes UMP, ce que rejette Wallerand de Saint-Just.
A Coûteaux qui a déclaré : « Nous sommes en progrès, il faut que NKM en prenne compte », ajoutant : « La gestion municipale de Delanoë-Hidalgo mérite qu’on se saisisse de toutes les occasions pour battre la gauche », Saint-Just a répondu : « M. Coûteaux n’a aucune qualité pour s’exprimer sur ces prérogatives. » Réaction immédiate de l’intellectuel gaulliste, qui ne porte manifestement pas le trésorier et vice-président du FN dans son cœur : « M. Wallerand de Saint-Just n’a pas qualité pour intervenir sur l’expression du Siel. » Oups. Autrement dit : va donc pérorer au FN, moi je m’occupe du Siel.
Anne Hidalgo et le principe de Peter
Saint-Just, propulsé à la surprise générale tête de liste à Paris alors qu’il est élu de Picardie, n’a jamais réussi à faire décoller sa campagne qui manquait à la fois de lisibilité et de dynamisme. Les Parisiens n’ont jamais vraiment compris pourquoi il fallait voter pour lui plutôt que pour les listes divers droite de Beigbeder, ce qui est toujours embêtant en politique. Lui-même n’atteint que 6,31 % dans le XVè arrondissement alors qu’il espérait plus de 10 % et un maintien au second tour.
Et l’UMP ? Elle arrive en tête dans deux arrondissements détenus par la gauche, le IXè et le IVè. La candidate du IXè, Delphine Burckli est l’ancienne collaboratrice de Pierre Lellouche ; celui du IVè, Vincent Roger, était conseiller social de François Fillon à Matignon. Ils connaissent bien leurs arrondissements mais la victoire sera difficile. Et au final qu’importe…
Car les deux arrondissements clefs du scrutin, le XIIè et le XIVè, – où se présentait NKM, devancée par une socialiste totalement inconnue – resteront aux mains de la gauche. Quant au Vè, à l’heure où nous écrivons cet article, l’accord semblait compromis entre la candidate officielle de l’UMP, Florence Berthout, et Dominique Tiberi, fils de l’ancien maire de Paris. Cet arrondissement pourrait donc être perdu, dans les urnes, alors que la gauche avait tant de fois tenté de le gagner dans les prétoires.
Hidalgo maire de Paris ? Sauf miracle pour NKM, la candidate dont il restera de la campagne qu’elle a connu des « moments de grâce » dans le métro et qu’elle changeait de tenue tous les jours, même pour aller fumer un clope avec les clodos, Anne Hidalgo a gagné le droit de diriger la capitale pendant six ans. Ça a parfois des avantages de ne pas être connu… de ses électeurs.
Dans l’équipe Delanoë, où on la connaît, certains préparent déjà leurs valises, invoquant un caractère insupportable, une inculture crasse et le principe de Peter, celui en vertu duquel « dans une hiérarchie, tout employé a tendance à s’élever à son niveau d’incompétence ».
Lionel Humbert