Nier jusqu’à l’évidence, telle est la méthode des voyous devant la police. Telle est aussi la méthode de Christiane Taubira, qui vient de sacrifier sa directrice de cabinet sur l’autel de sa réputation.

Ç a y est ! Taubira l’a trouvé ! Quoi ? Le fusible ! Christine Maugüé, sa directrice de ca­binet, avait complètement oublié de lui dire que Nicolas Sarkozy était sur écoutes ! Si c’est pas ballot quand même… Sa collaboratrice la plus proche l’aurait su le 26 février mais elle n’y aurait pas prêté garde avant le 11 mars… Ou elle aurait eu la tête ailleurs…
A 51 ans, cette énarque, après avoir été longtemps en poste au Conseil d’E­tat, aurait commis une erreur de débutante ! L’avocat général près la cour d’appel de Paris écrit à la garde des Sceaux pour l’entretenir du fumeux dossier dit « des financements libyens » de la campagne présidentielle de 2007 de Nicolas Sarkozy, il l’informe des conversations que l’ancien chef de l’Etat a eues avec son avocat, et, erreur d’aiguillage, le courrier reste deux semaines dans le tiroir de la directrice de cabinet !

Le mari de la gourde travaille avec Hollande
Tout aussi fort : ladite directrice de cabinet, brusquement sous les feux de la rampe avant, sans doute, de faire l’ob­jet d’une promotion-sanction, n’en aurait pas non plus parlé à son mari, membre du « premier cercle » de François Hollande, corédacteur du programme du candidat en 2012, actuel conseiller parlementaire de Fran­çois Hollande à l’Elysée – et pro­che aussi… de Manuel Valls.
Christine Maugüé savait tout, mais Christiane Taubira ne savait rien et Bernard Rullier, le mari de la direc­trice de cabinet, non plus, ce qui explique que François Hollande ait lui aussi été tenu dans l’ignorance de la mise sur écoutes de Nicolas Sarkozy.
A la limite, c’est une chance que la presse ait révélé l’affaire car sinon, à l’heure qu’il est, dame Taubira n’en saurait toujours rien… Une sacrée chance que, le 7 mars, elle ait lu « Le Monde » ce que sa directrice de cabinet n’a pas fait, à moins qu’elle ne l’ait lu et n’ait pas fait le rapprochement avec les courriers qu’elle avait dans son tiroir…
De sorte que le 10 mars, quand elle est apparue sur TF1, Christiane Taubira n’était tou­jours, officiellement, au courant de rien ! Elle n’aurait appris que le 11 mars au soir, au cours d’une réunion « houleuse » place Vendôme, que sa collaboratrice avait fait, comme le dit la journaliste d’iTélé dont les révélations viennent opportunément épar­gner à Taubira le déchirement d’une démission, « de la rétention d’informations pendant douze jours ». D’ici à quarante-huit heures, Christine Mau­güé devrait être décrétée nerveusement perturbée par une autre fuite pas du tout organisée…

Tout ce que Taubira n’a pas dit, n’a pas fait
Christiane Taubira, c’est donc bien ce qu’elle disait, c’est l’oie blanche. Innocente comme l’enfant qui vient de naî­tre, naïve, candide, vierge de tout pé­ché fût-il un péché véniel comme le mensonge par omission. Elle n’a pas menti, elle ne savait pas. Elle n’a pas menti, elle a juste été « imprécise » et tout n’est que « malentendu ». Elle n’a pas menti, elle a été trompée. Elle est victime.
Elle a déjà épuisé, au ministère de la Justice, un nombre incalculable de collaborateurs mais elle n’est pas dicta­toriale ; c’est juste que, comme Christine Maugüé, ils n’étaient pas à la hauteur. Elle siégeait au comité de parrainage de l’association Anticor quand celle-ci a porté plainte contre Patrick Buisson mais elle n’est pas juge et partie, elle avait oublié d’en dé­missionner. Elle n’a jamais embauché son compagnon à son cabinet, c’est juste qu’elle a un tel charme qu’on lui prête des aventures qu’elle n’a pas et que les gens sont machistes et que, pour eux, « femme qui dérange couche forcément ».
Elle n’a jamais voulu éviter que les délinquants soient incarcérés, c’est la droite qui lui fait systématiquement un procès en laxisme, comme ce ministre de droite qu’est Manuel Valls, et d’ailleurs elle ne va tarder à le prouver lors de la discussion de son projet de réforme pénale qui n’a jamais été re­porté, pas même un tout petit peu différé, juste programmé pour venir en discussion après les municipales, au cas où ces réactionnaires de Français s’en indignent. Etc.
Christiane Taubira n’est pas, n’a jamais été et ne sera jamais le bras armé de François Hollande dans son combat de cinq ans contre Nicolas Sarko­zy pour empêcher le retour de celui-ci (voir page suivante). La garde des Sceaux n’a aucune prise sur la justice car, a-t-elle dit sur TF1, « il y a un changement dans la société, un changement dans la démocratie française, un changement dans l’institution judiciaire. Ce changement, c’est que dans ce pays, dorénavant, il peut s’écouler plusieurs mois sans que le garde des Sceaux soit informé qu’un ancien président de la République est sous écoute. Voilà le pays dans lequel nous vivons depuis vingt mois et je m’en réjouis. »
Les affaires du PS qui traînent en longueur, à Marseille par exemple ? Ce n’est que de la responsabilité des juges qui ont besoin de temps pour ficeler leurs dossiers.
Les affaires qui se multiplient contre Nicolas Sarkozy (sans que rien n’ait d’ailleurs été établi contre lui à ce jour) ? C’est de la responsabilité des juges qui ont flairé anguilles sous roche et conduisent promp­tement leurs investigations.
La mise sur écoute d’un avo­cat qui scandalise la profession quasi unanime ? Il ne doit plus y avoir de profession protégée, rien d’autre. Et s’il y a des fuites dans la presse, c’est que celle-ci fait son travail.
Taubira ? Une oie blanche.  
Lionel Humbert