Le Syndicat du Livre est l’une des dernières structures staliniennes de France. A coups de grèves sauvages, il asphyxie les journaux. Dont « Minute ». Nous avons besoin de vous pour tenir.
Ça a commencé – ou plutôt recommencé – à l’automne dernier. Et depuis le début de l’année, ça s’accentue. Pas une semaine sans qu’il y ait un « mouvement social » qui perturbe la distribution des journaux. Presstalis (les ex-NMPP) veut et doit absolument se restructurer sous peine de disparaître. Or le SGLCE, le Syndicat général du Livre et de la Communication écrite, plus connu sous son nom historique de Syndicat du Livre, ne veut pas. Ou alors à ses conditions.
Presstalis, en incluant ses filiales, doit supprimer environ la moitié de ses effectifs s’il veut avoir une chance de survivre. Rien à voir, ici, avec la recherche d’un taux de rentabilité indécent. La mondialisation non plus n’y est pour rien.
Presstalis veut juste échapper au dépôt de bilan, inéluctable si l’on en croit le Dossier d’information des représentants du personnel remis au Comité central d’entreprise du 15 octobre 2012 et publié par Mediapart. « A défaut d’action immédiate », y lit-on, le total des pertes d’exploitation du groupe atteindrait 240 millions d’euros en 2 015 ! A l’évidence, c’est intenable. Ce serait le dépôt de bilan et la liquidation judiciaire assurés, et cela sans attendre 2 015.
Depuis septembre, on a compté une trentaine de jours de non-parution des journaux. Car telle est la méthode choisie par le SGLCE-CGT : pour faire plier Presstalis, on s’attaque à la presse ! Quand il n’y aura plus de journaux, il n’y aura plus besoin de Presstalis, donc de ses salariés… Mais ça, ils n’ont pas dû y penser. Le Syndicat du Livre campe sur la ligne du « zéro licenciement » ! Ne partiraient que ceux qui le veulent bien. Et avec un gros, gros chèque qui pourrait atteindre 100 000 euros.
Bonne poire, Presstalis propose un plan social outrageusement généreux qui prévoit « des reclassements dans les entreprises publiques, comme La Poste, la SNCF ou la RATP », dont on ignorait qu’elles manquaient de personnel ! Inacceptable néanmoins pour le Syndicat du Livre, dirigé par une grande gueule évidemment membre du Parti communiste, dans la mesure où les camarades syndiqués, à coups de primes de casse-croûte ou de « pénibilité », touchent des salaires de cadre supérieur, y compris pour recompter les paquets de journaux que les machines, pas plus nulles en additions, ont déjà comptabilisés.
Rien qu’en 2012, 1 082 points de vente ont disparu
Fort de l’impunité dont le Livre jouit depuis soixante-dix ans, son secrétaire général fanfaronnait encore il y a quelques jours : « Nous rejetons ce plan et ne sommes pas dans une logique de négociation. Nous allons poursuivre les actions de blocage. » En s’asseyant allègrement sur le Code du travail, le Code pénal, la jurisprudence de la Cour de cassation et la Déclaration des droits de l’homme dans laquelle on peut lire (article 11) que « la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme ». Et que leur importe si les marchands de journaux, qui ne gagnent rien quand ils n’ont rien à vendre, sonnent le tocsin. Du moins ceux qui n’ont pas déjà jeté l’éponge : rien qu’en 2012, 1 082 points de vente ont disparu.
Pour « Minute », la note est salée
Pour « Minute » aussi la note est salée. Depuis octobre, sept grèves, a minima, – sans préavis, tant qu’on y est –, sont tombées le mardi ou le mercredi, empêchant la mise en vente normale de « Minute ». Un bonheur n’arrivant jamais seul, trois de ces numéros avaient été conçus spécialement pour la vente chez les marchands de journaux, avec des « unes » fortes, accrocheuses, destinées à stimuler, selon l’expression consacrée, « l’achat d’impulsion » et accompagnées, en amont, d’un dispositif promotionnel qui n’a servi à rien.
Ces sept numéros ont bien fini par paraître mais le jeudi, le vendredi voire le samedi, car il ne faudrait pas croire que les grévistes, une fois leur journée revendicatrice passée, vont activer la cadence pour rattraper le retard… Or les résultats de la vente en kiosques ou chez les marchands de journaux obéissent à quelques règles : notamment la régularité du jour de parution et le temps de présence dans les rayons. « Minute », par exemple, c’est le mercredi, comme « Le Canard enchaîné » et « Charlie hebdo ».
Les ventes ont donc été moindres (compensées en partie heureusement, mais en petite partie seulement par l’achat au numéro sur notre site Internet) et les invendus plus nombreux, ce qui est vraiment pas de chance car l’argent que la presse perçoit de Presstalis est calculé… sur les invendus. Quand ça veut pas, ça veut pas… Et quand ça vient, un an et demi après le passage de Presstalis de société à responsabilité limitée à société par actions simplifiées, opération financée par les éditeurs, et un peu plus d’un an après que le montant de la commission perçue par Presstalis a augmenté de 30 %, ça gave sévère.
A « Minute », pour traverser cette période d’incertitudes, tant en durée qu’en niveau de trésorerie, nous n’avons que deux solutions : transformer nos lecteurs au numéro en abonnés ou faire appel aux dons. Seuls vos dons et/ou vos abonnements, rapides, nombreux et même en masse s’il vous plaît, nous permettront d’envisager l’avenir proche et à moyen terme avec sérénité.
Aux marchands de journaux qui pourraient prendre cet appel aux abonnements comme une double peine, je serai très clair : 1. nous n’avons nullement l’intention de nous retirer des kiosques ; 2. nous entendons même, une fois le conflit social achevé, renforcer notre présence dans le réseau de diffusion et cela nous sera d’autant plus possible que nous aurons, grâce à nos nouveaux abonnés, généré des réserves.
Pour l’heure, il nous faut parer à l’urgence et l’urgence, c’est de compenser tout de suite les pertes dues aux saboteurs staliniens qui agissent, mais qui s’en étonnera encore, dans la plus totale impunité et qui se font les alliés objectifs des grands groupes de presse qui, eux, ont les moyens financiers de tenir le temps qu’il faudra.
Nous savons que nous pouvons compter sur vous.
Jean-Marie Molitor,
directeur de « Minute »
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