Dès que sort une information, et plus encore lorsque celle-ci se transforme en affaire d’Etat, ceux qui se prennent la divulgation en pleine figure n’ont qu’une question à l’esprit : « Qui c’est qu’a cafté ? » Trouver l’informateur – le correspondant, l’indic, le vocable dépend du degré de haine que l’on porte à la « balance » supposée – est l’obsession policière la mieux partagée par toute la classe politique.
La grande affaire de ces jours-ci est de savoir qui a « donné » au « Monde », qui en est à l’origine, l’affaire Benalla. Un flic ? Un gendarme ? Un haut fonctionnaire ? Un adversaire, un ami politique ? Et, comme l’affaire est à tiroirs, qui a « filé » ceci, qui a fait « fuiter » cela.
Dernier épisode en date mais certainement pas l’ultime, ainsi résumé par le « Journal du dimanche » : « Qui a informé le député de l’opposition Marc Le Fur de l’attribution à Alexandre Benalla d’un badge d’accès privilégié [à l’Assemblée nationale] ? » « La majorité veut trouver la taupe à l’Assemblée », écrit « Le Figaro ». Et les députés LREM de s’indigner du viol des « règles de confidentialité » et d’en appeler à des « sanctions ».
Un jour que j’étais dans le bureau d’un juge d’instruction qui connaissait les règles, et particulièrement celles du savoir-vivre, et qu’il me demandait, parce que la procédure l’exigeait, comment un document m’était parvenu, je lui répondis que je ne savais plus si je l’avais trouvé dans une poubelle ou si je l’avais reçu par la poste de façon anonyme. Il me dit simplement : « Par la poste, c’est plus vraisemblable. » Puis, après un temps d’arrêt, il ajouta : « Et naturellement, vous avez jeté l’enveloppe ? » « Naturellement », lui répondis-je dans un sourire.
Et l’affaire fut close. A. V.