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Un ancien du FN candidat à la présidence de l’UMP

Jean-François Copé et François Fillon ne sont pas les deux seuls candidats à la présidence de l’UMP. Sont aussi en lice les anciens ministres Bruno Le Maire, Nathalie Kosciusko-Morizet et Xavier Bertrand, ainsi que Philippe Herlin. Adhérent de l’UMP depuis le 7 mai 2012, ancien du Front national qu’il a quitté en raison de sa « dérive étatiste », il défend une ligne libéral-conservatrice. Economiste et musicologue, âgé de 45 ans, il espère au moins prendre date pour l’avenir (1).

Minute : Peu connu pour ne pas dire inconnu, vous êtes candidat à la présidence de l’UMP. Pour quelle raison ? Pour faire parler de vous ?

Philippe Herlin : Je suis candidat pour des motifs politiques. La raison principale est que, parmi les candidats déclarés, il n’y en a au­cun qui soit libéral en économie, conservateur sur les questions de société et ouvert à des accords lo­caux avec le Front national, ce qui sont mes trois axes de campagne interne. Si Thierry Mariani, même s’il n’est pas très libéral en économie, avait été candidat, je n’y serais pas allé. Mais là, je me suis dit qu’il n’était pas possible de laisser le dé­bat se dérouler entre les quatre « principaux » candidats.

Vous espérez être élu ?

Je me suis rendu compte en tout cas que les idées que je porte correspondent à une attente. J’ai été agréablement surpris par le nom­bre de messages d’encouragements que j’ai reçus. Quel que soit le résultat du scrutin, qui dépend aussi de considérations tactiques, les adhérents de l’UMP manifestent une net­te volonté de rupture avec l’i­déologie dominante de la gauche qui imprègne encore l’UMP. Voyez NKM…

Vous vous définissez comme « libéral-conservateur ». L’UMP n’est-elle donc ni libérale ni conservatrice ?

C’est tout le problème. Le libéral-conservatisme ne devrait pas être un courant mais la ligne directrice d’un véritable parti de droite, comme c’est le cas en Grande-Breta­gne avec le Parti conservateur ou en Allemagne avec la CDU-CSU.
Or en France, leur équivalent, l’UMP, reste plutôt étatiste dans ses conceptions économiques et, sur les questions de société, elle a peur d’ap­paraître comme conservatrice.
Or être conservateur, au sens où l’entendent les Anglo-Saxons, c’est très noble puisque c’est vouloir sauvegarder les principes essentiels de nos sociétés tels qu’ils découlent de notre civilisation.

Concrètement, que proposez-vous de « conservateur » qui s’inscrive dans cette mission de sauvegarde ?

Je vous en citerai deux: l’instauration du chèque scolaire, afin de permettre aux parents de choisir librement l’école dans la­quelle ils veulent scolariser leurs en­fants, publique ou privée, sa­chant que les écoles privées sont ac­tuellement engorgées et ne peuvent satisfaire la demande qui, en raison de la faillite de l’Education nationale, est devenue considérable ; l’abolition de la loi SRU qui con­traint les communes à avoir 20 % de logements dits sociaux – seuil qui doit être porté à 25 % dans les prochaines semaines ! –, et qui constitue une sorte de socialisation progressive du marché du logement.Vous noterez que, lorsque la SRU a été adoptée en 2000 sous le gouvernement Jospin, la droite s’est opposée à ce dispositif de « mixité sociale » porté par le mi­nistre du Logement de l’époque, le communiste Jean-Claude Gayssot. Mais quand elle est revenue aux affaires, elle ne l’a pas supprimé. Comme s’il lui était impossible de se défaire de sa soumission intellectuelle à la gauche… C’est cela qu’il faut inverser ; il faut mener et ga­gner la bataille des idées.

Et en matière d’immigration ?

Il faut abolir le droit du sol pour en revenir au droit de filiation afin de stopper ce que Valéry Giscard d’Estaing avait appelé une « invasion » dans un fameux entretien ac­cordé en septembre 1991 au « Figaro Magazine », supprimer toutes les pompes aspirantes telle l’Aide médicale d’Etat (AME), qui coûte chaque année 600 millions d’euros et profite à des centaines de milliers d’étrangers en situation irrégulière (sans compter les fraudes que vient de détailler votre confrère « Valeurs actuelles »), et bien sûr, rétablir la « double peine » que Nicolas Sarkozy avait supprimée lorsqu’il était ministre de l’Intérieur et qu’il n’a pas eu le courage de rétablir lorsqu’il est devenu président.
« On peut intégrer des individus ; et encore, dans une certaine mesure seulement. On n’intègre pas des peu­ples, avec leur passé, leurs traditions, leurs souvenirs communs de batailles gagnées ou perdues, leurs héros. » La phrase est du général De Gaulle…

Vous vous dites libéral à un moment où le libéralisme est accusé de tous les maux et est synonyme de mondialisation, de désindustrialisation, etc. Qu’est-ce pour vous qu’être libéral en économie ?

Le mot « libéral » est en effet de­venu une insulte. Comme toujours, la première étape est de gagner la bataille du vocabulaire.
Je demande ni plus ni moins que l’Etat se concentre sur ses fonctions régaliennes et cesse son interventionnisme tous azimuts. Le taux de prélèvements obligatoires tourne autour de 45 %, ce qui veut dire que près de la moitié de la richesse nationale est captée par l’Etat. Comment voulez-vous rester ou redevenir compétitif dans ces conditions ? Je demande à ce qu’on en revienne à un taux de 35 %, qui était le chiffre d’avant la crise de 1973.

Ce qui fait dix points de différence. Où faites-vous les économies ?
Poser la question ainsi est faire un raisonnement uniquement comptable. Avant la crise de 1973, que je sa­che, les Français bénéficiaient d’une protection sociale qui n’avait rien à envier à celle d’aujourd’hui, ils étaient correctement soignés et les routes étaient construites !
Ce qu’il nous faut, c’est changer la façon de fonctionner – et de raisonner – en procédant à des ré­formes structurelles. Par exemple en privatisant ou en rationalisant certains services. Il n’est pas normal, ni supportable, que les opérations coûtent 50 % plus cher dans les hôpitaux publics que dans les établissements privés.

Le protectionnisme est-il pour vous un « gros mot » ?

Ce n’est pas un « gros mot » car je refuse de fonctionner en terme de tabou. Mais je pense que ce n’est pas la solution. C’est comme de re­venir au franc pour pouvoir dévaluer. Pour moi, le problème de base est que l’Etat capte beaucoup trop de la richesse créée.

Vous êtes donc favorable à la poursuite de la construction européenne ?

Je suis un pro-européen critique. La construction européenne doit se faire selon le principe de subsidiarité et se dégager de l’actuelle emprise bureaucratique. Les Etats doivent reprendre du pouvoir par rapport à la Commission européenne, laquelle doit cesser de tout vouloir régenter.

Vous venez du Front national. Pourquoi l’avez-vous quitté ?

J’ai en effet adhéré au Front national après le 21 avril 2002 quand j’ai compris que Marine Le Pen allait prendre la direction du mouvement. Et comme la politique me passionne, j’ai été officiellement candidat aux élections régionales en Ile-de-France en 2004. Après quoi je suis devenu attaché de groupe au conseil régional de Lorraine avant de l’être en Ile-de-France et en m’étant, dans l’intervalle, occupé de la recherche des parrainages pour l’élection présidentielle de 2007. Ayant été critique musical, j’ai également participé à la production de notes sur la culture pour Marine Le Pen. J’ai quitté le Front national en juillet 2008, quand Marine Le Pen a pris un virage très étatique en ma­tière économique que je ne m’explique toujours pas.
Contrairement à ce qu’elle dit et peut-être à ce qu’elle croit, elle est, en ce domaine, semblable à la ma­jorité de la classe politique. Sur ce terrain-là, elle s’est rangée du côté du système.
Il est vrai qu’il est plus facile, en France, d’être étatiste que libéral. Mais de là à prôner, comme elle le fait, la nationalisation de Peugeot…

Et quand et pourquoi avez-vous rejoint l’UMP ?

J’ai pris ma carte le lundi 7 mai 2012 sur Internet. Cela peut vous paraître bizarre mais cela a été une démarche d’adhésion à la campa­gne de Nicolas Sarkozy qui a été très bonne, comme celle de 2007, et qui a eu au moins le mérite de faire bouger les lignes, de placer le combat dans le domaine sémantique, de bousculer bon nombre de ta­bous, de ne pas céder devant les cris d’orfraie de la gauche, raisons pour lesquelles j’avais voté pour lui dès le premier tour.
Une autre raison de mon adhésion est la volonté affichée par la direction de l’UMP de démocratiser son fonctionnement, en permettant aux militants de choisir leurs candidats. Dans la mesure où les militants sont plus à droite (ou, tout simplement, sont de droite) que l’état major qui incline vers le centre gauche, j’ai pensé qu’il y avait là la possibilité d’avoir un parti de droite qui soit vraiment à droite. Nous verrons, à l’avenir, ce qu’il en est réellement.

Pour vous, Copé et Fillon, c’est blanc bonnet et bonnet blanc ?

Il y a une différence dans la me­sure où Jean-François Copé a dit qu’il s’inscrivait dans la continuité de Nicolas Sarkozy et qu’il n’a ja­mais critiqué ce qu’on a appelé « la droitisation de la campagne », alors que François Fillon, lui, a pris plusieurs fois ses distances, notamment lorsque Nicolas Sarkozy s’en était pris aux syndicats.

Il faut près de 8 000 parrainages d’adhérents pour se porter candidat à la présidence de l’UMP.  Vous pensez vraiment les obtenir ?

Depuis le départ, je sais que cet objectif sera extrêmement difficile à atteindre mais je ne suis pas le seul à avoir du mal à les obtenir. Nathalie Kosciusko-Morizet et Bruno Le Maire ont reconnu qu’ils éprouvaient beaucoup de peine à les re­cueillir.
Je me refuse quand même à croire que l’élection se limitera à un duel entre Copé et Fillon, ce qui ne prouverait qu’une chose : que tous les deux ont complètement verrouil­lé l’appareil.
 On ne peut toutefois pas l’exclu­re puisque les candidats à la présidence n’ont pas accès, même indirectement, au fichier des adhérents pour leur envoyer un mail ! Moi-même, en tant que simple adhérent, je n’ai rien reçu qui m’expli­que clairement qu’il faut parrainer quelqu’un pour qu’il puisse se porter candidat et comment je dois pro­céder ! C’est proprement hallucinant, surtout que la période de trois mois pour recueillir les parrainages couvrait les deux mois d’été pour s’achever le 18 septembre ! En fait de trois mois, on a trois se­mai­nes !
Quoi qu’il advienne, j’aurai créé quelque chose que je maintiendrai par la suite pour que les idées libéral-conservatrices puissent se faire entendre et se propager au sein de l’UMP et ailleurs, dans toute la société.     n

Propos recueillis par Lionel Humbert

1. Philippe Herlin dispose d’un blog : www.philippeherlin.com

 

 

Informations supplémentaires

  • Publié dans le numéro : 2578
  • Auteur : Lionel Humbert
Dernière modification le

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